Le terme non-directivité a été inventé en 1942 par le psychothérapeute et formateur américain Carl Ransom Rogers (1902 – 1987). C’est dans la seconde moitié du XXe siècle que la non –directivité va devenir un des lieux communs de la culture éducative « moderne ». « Lors de la grande rébellion culturelle et sociale de 1968, la non-directivité a fait partie, comme une composante qui va de soi, des revendications libertaires illustrées par le slogan "Il est interdit d'interdire". Permissivité contre répression, créativité contre conformité, autodidaxie contre transmission : la non-directivité semble donner un nom à une nouvelle conception des relations humaines, de la relation au savoir et aux traditions, dans la famille, à l'école, dans les institutions, les organisations. »[1]
La pédagogie non-directive préconise une méthode où chaque élève participe aux décisions de la classe « en exerçant son autonomie et en donnant un sens à des études grâce à un équilibre consenti entre ses obligations et ses libertés individuelles ». (G. Longhi) Ici, « le maître apporte une aide et une écoute qui doivent permettre à chaque élève de développer sa personnalité à travers les apprentissages »[2]. (Rogers) On n’impose ni le programme, ni les règlements internes (contrairement à l’autoritarisme ou au dirigisme) : tout doit être négociable. Gilbert Longhi, dans son Dictionnaire de l’éducation (2009), résume la pédagogie non-directive (ou la non-directivité) en six recommandations prééminentes :
- S’abstenir de toute pression sur le sujet (ou le groupe) ;
- Faire confiance aux capacités d’autonomie et de responsabilité ;
- Instaurer un climat d’empathie et de respect permettant d’une part à tout élève d’extérioriser l’authenticité de ce qu’il ressent, d’autre part à l’enseignant d’exprimer aussi ses propres avis ;
- Développer la place du vécu, de l’expérimentation personnelle et de la découverte par soi-même plutôt que l’accumulation de savoir provenant du maître ;
- Utiliser le groupe (classe) comme énergie de changement des personnes (élèves) qui en font partie ;
- Eviter tout système (doctrine) pédagogique à prétention universelle.
Toutefois, les opposants de la non-directivité soulèvent quatre objections (G. Longhi) :
- L’effacement du professeur condamne les élèves à se réfugier dans des stéréotypes comportementaux ;
- Les connaissances ne sont plus transmises en quantité et en qualité suffisantes, au motif que les élèves doivent être disposés à les découvrir d’eux-mêmes ;
- La gestion de la vie de groupe épuise le temps de classe dans les aléas relationnels (les sentiments, les affects) et dans les détails de la vie matérielle ;
- La pédagogie non directive sombre dans le pédagogisme quand elle se contente d’apprendre à apprendre sans déboucher de façon concrète sur des apprentissages utilisables pour la poursuite d’études et au-delà pour l’insertion socioprofessionnelle.